Eros divin contre Eros terrestre, un duel entre Caravage et Giovanni Baglione
Giovanni Baglione 1566/1643, L'éros divin bat l'éros terrestre, vers 1602
C'est en réponse à L'Amour victorieux du Caravage dont il s'inspire clairement que Baglionne exécute son tableau et lui vaut d'être ridiculisé en public par Caravage qu'il trainera en justice en 1603 pour s'en être moqué. Cette animosité sera telle qu'il lui fera un second procès, 3ans plus tard.
Amour vainqueur ; Amor Vincit Omnia
La composition de Baglionne n'est pas sans rappeler Saint Michel terrassant le démon, de Raphael, 1518.
Ici, Baglione représente l'Amour sacré, tout aussi cuirassé, brandissant la flèche censée tuer l'amour profane, son cadet. Ce combat qui a largement inspiré les artistes est très fortement imprimé dans l'inconscient collectif qui voit toujours le bien contre le mal.
À noter que Baglionne représente Éros Divin sous les traits d'un éphèbe et l'Éros Terrestre sous les traits d'un enfant.
Dans le Banquet, Platon approuve cette distinction des deux Éros que faisait Pausanias : "Comme il y a deux Aphrodite, il y a deux Éros, un Éros populaire, « c’est l’amour qui règne parmi les gens du commun. Ils aiment sans choix, non moins les femmes que les jeunes gens, plutôt le corps que l’âme. Ils n’aspirent qu’à la jouissance, pourvu qu’ils y parviennent, peu leur importe par quels moyens. Mais un Éros fidèle, qui ne recherche que les jeunes gens, qui n’aime que le sexe masculin, est naturellement plus fort et plus intelligent ».
Amour sacré, Amour Profane, cercle de guido Reni, 1622.
À la distinction que fait Pausanias, Platon complète : " l’Éros ne réside pas seulement dans l’âme, mais aussi dans la beauté, dans les corps de tous les animaux, dans les productions de la terre, en un mot, dans tous les êtres. L’Éros légitime et céleste est celui de la muse Uranie. Mais pour celui de Polymnie, qui est l’Éros vulgaire, on ne doit le favoriser qu’avec une grande réserve, en sorte que l’agrément qu’il procure ne puisse jamais porter au "dérèglement" » c'est a dire a la copulation...
Francesco Vanni, 1563/1610, Amour sacré contre amour profane.
Le garçon encore impubère qui servit de modèle au Caravage pour son Amour Victorieux est probablement son élève Cecco (Francesco Boneri), l’un des jeunes amants de l’artiste, qui deviendra peintre à son tour sous le nom de Cecco del Caravaggio.
Parce qu'il trouve l'œuvre de Caravage trop sensuel à son goût, Giovanni Baglione peint cette 2éme version que l'on peut voir au Palazzo Barberini, de Rome, caricaturant Caravage en satyre démoniaque et Cecco, l'amour profane soumis a l'ire de Baglione, qui se représentant en amour sacré est donc vainqueur du Caravage...
Mais la postérité retiendra le fougueux Caravage et non Baglione le revanchard....
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